Pour une fois qu'Apple et Microsoft sont d'accord sur quelque chose. Comme le rappelle le site américain Slate, Steve Jobs avait un rêve : révolutionner la télévision. Et bien avec la Xbox One, dévoilée mardi 21 mai, Microsoft semble décidé à vouloir concrétiser l'ambition de feu le fondateur de la marque à la pomme.

La nouvelle console de jeu du géant américain est, en effet, la tentative la plus ambitieuse à ce jour pour rendre la télé de nouveau sexy. Car, dissipons tout de suite un malentendu : la Xbox One ne s'adresse pas seulement aux joueurs. Loin de là. Du point de vue du "gamer", le contributeur du Plus du site du Nouvel Obs, Daniel Andreyev, a parfaitement raison : la nouvelle console de Microsoft s'annonce comme un flop comparé à la PS4 de Sony. Aucune annonce tonitruante de jeux exclusifs et une machine qui n'arrive pas à la hauteur de celle de Sony en terme de puissance.

Mais c'est comme dire qu'un iPhone est moins bon qu'un téléphone filaire parce qu'il pêche au niveau de la qualité de réception. En fait, Microsoft est parti d'un constat simple : le téléviseur, aussi important soit-il dans la vie de millions de personnes, n'excite plus le consommateur. Ce dernier est capable de dépenser près de 600 euros pour un smartphone dernier cri, mais va rechigner à mettre la même somme dans une télé.

C'est que le bon vieil écran du salon ne le fait plus rêver. Microsoft juge que pour vendre des consoles, il faut dépoussiérer l'image du poste de télévision. Sinon, les Xbox, PS4 et Wii U risquent d'être frappées par ricochet du syndrome "has been".

Moderne ou avant-gardiste ?

Ce n'est pas un hasard si Microsoft a dévoilé sa console avant la tenue du salon 100% gamer de l'E3 à Los Angeles. Ce n'est pas, non plus, un hasard si le titre du communiqué de presse officiel d'annonce de la Xbox One ne comporte pas le mot "jeu vidéo". Le constructeur américain veut que le public se rappelle, avant tout, qu'il est possible de passer des coups de fil Skype depuis la Xbox One. Il veut qu'on comprenne que la console offre l'opportunité de regarder la télévision en direct (du moins aux États-Unis).

Enfin, il lui semble essentiel que l'éventuel acheteur ait conscience qu'il n'aura quasiment pas besoin d'utiliser une manette de jeu pour faire fonctionner la Xbox One. Tout ou presque passe par les commandes vocales ou les gestes du corps captés par le Kinect, le périphérique de reconnaissance des mouvements censé libérer la console du carcan du joystick.

Comble de cette approche qui vise à "dégeekifier" la Xbox : pour parler de l'icône absolue de son univers vidéoludique - la série de jeux vidéo Halo - Microsoft a annoncé le lancement d'une série télé avec la participation de Steven Spielberg.

Paradoxalement, Microsoft semble donc croire que le jeu vidéo n'est pas le principal moteur d'achat pour une console de... jeu, contrairement à Sony et Nintendo. Les fans de Xbox diront probablement que c'est une approche du marché moderniste. Les autres trouveront cette démarche un brin trop avant-gardiste. Nul ne conteste, en effet, que les principaux acheteurs de consoles sont avant tout des joueurs. Si Microsoft ne leur donne pas quelques os à ronger lors de l'E3 sous forme d'annonces de jeux à venir, le géant américain risque de se transformer en artiste incompris. Et contrairement à un peintre qui peut toujours se dire que son œuvre finira par être reconnue à sa juste valeur, une entreprise à but lucratif comme Microsoft peut difficilement se permettre de laisser du temps au temps. Surtout sur un marché aussi compétitif que le jeu vidéo.