La décision de l’Assemblée nationale de rendre obligatoire un label "fait maison" dans les restaurants est jugée trop fade par les restaurateurs qui espèrent marquer leur différence avec les établissements proposant de la cuisine industrielle.



Bœufs bourguignons sous vide et autres mœlleux au chocolat industriels réchauffés à la va-vite ont du souci à se faire. Dans un rare moment d’union sacrée, les députés UMP et PS de l’Assemblée nationale ont adopté, jeudi 27 juin, un amendement rendant obligatoire dans les restaurants l’ajout d’une mention "fait maison" pour les plats cuisinés sur place à partir de produits bruts. Objectif des parlementaires : imposer un minimum de transparence dans un secteur où prolifèrent les plats industriels à l’insu des consommateurs.



"Il y a de plus en plus de restaurants qui vendent des plats pré-cuisinés, qui font baisser le niveau général (…) tout finit par avoir le même goût et ça encourage une restauration à deux vitesses où seuls les riches pourront se permettre de manger des produits frais", confie à FRANCE24 Alain Fontaine, patron du restaurant Le Mesturet dans le quartier de l’Opéra à Paris.
Sauvegarde du patrimoine gastronomique
Entre les scandales agro-alimentaires et les nombreux restaurants servant des tambouilles insipides issues de barquettes surgelées, une législation informant le consommateur sur le contenu de son assiette était devenue urgente. Pourtant, ce label "fait maison" laisse de nombreux restaurateurs sur leur faim.
ہ la tête de treize cuisiniers qualifiés, Alain Fontaine souligne que cette appellation n’est qu’un "premier pas vers la sauvegarde de notre patrimoine gastronomique". Le restaurateur veut aller plus loin en soutenant les initiatives visant à créer un véritable label "restaurant" qui ne serait décerné qu’aux établissements qui préparent tous leurs plats sur place.
Casse-tête logistique
Par ailleurs, la mise en œuvre de cette mesure promet d’être un sacré casse-tête pour les établissements dont la carte comprend une partie de produits préparés sur place et une partie de plats industriels – l’ajout partiel de l’appellation "fait maison" jettera aussitôt l’opprobre sur le moelleux au chocolat ou autre plat ne bénéficiant pas du label…
Comment appliquer alors dans ces circonstances l’ajout d’un label que certains restaurateurs préfèreraient ne pas utiliser du tout ? C’est ce que souligne le député UMP Daniel Fasquelle sur son blog en dénonçant une "demi-mesure" difficile à concrétiser : "Comment contraindre un restaurateur à mettre "fait maison" sur sa carte? Comment, en pratique, contrôler le respect de cette disposition ? Que se passera-t-il si la plupart des restaurateurs n'appliquent pas la règle nouvelle ?" L'amendement ne précise en effet pas, pour l'heure, les sanctions pénales qu'encourrent les restaurateurs fraudeurs.
La cuisine industrielle, pas forcément mauvaise
Tout en soulignant le besoin de mettre fin à l’opacité dans le secteur, le restaurateur Xavier Denamur propose quant à lui d’apaiser le débat en déconnectant le label "fait maison" de la qualité supposée des préparations.
"Un produit industriel peut être très bon, un plat "maison" très mauvais, la question ne porte pas sur la qualité. Il ne s’agit pas de diviser, d'opposer l'artisanat à l'industrie, mais d’informer", écrit le propriétaire de plusieurs restaurants parisiens dans une tribune publiée sur le site du Nouvel Observateur.